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Commission sur le copyright et autres problèmes juridiques » (CLM)
L'IFLA se félicite que l'UNESCO ait proposé de faire une étude sur les limitations et des exceptions au droit d'auteur dans l'environnement numérique. En tant que principal interlocuteur pour parler des droits d'auteur au nom des professionnels de l'information au niveau international ainsi que de leurs usagers dans les secteurs de l'éducation, du commerce et l'industrie, de la médecine, les secteurs associatif et public, l'IFLA est convaincue que les droits patrimoniaux des fournisseurs d'information doivent être rééquilibrés par le besoin de la société d'avoir accès à la connaissance. L'IFLA est soucieux constater que l'usage usage croissant des contrats de licences et des mesures de protection fait pencher de plus en plus la balance en faveur des intérêts économiques. Cette tendance, qui affecte les usagers de l'information dans le monde entier, a un impact particulièrement grave dans les pays en voie de développement.
Puisque l'on utilise de plus en plus les techniques numériques et en ligne pour créer et diffuser la connaissance et la culture, les questions liées au droit d'auteur numérique sont de plus en plus prégnantes. Si, dans l'environnement numérique, l'humanité est sur le point d'avoir a un accès aussi large que possible à son patrimoine, il est vital que les règles qui gouvernent un tel accès (surtout les règles de la propriété intellectuelle) soient analysées dans leur ensemble et de manière appropriée par un large panel des acteurs concernés. La défense acharnée qu'a toujours mené l'UNESCO en faveur de la promotion de la création et de la diffusion du patrimoine culturel mondial la rend apte à ce type de tâche.
Avant toute autre considération sur la limitation au droit d'auteur que représente le « Fair Use « (l'usage loyal) dans l'environnement numérique, on rappellera, dans un premier temps, ce qu'est le droit d'auteur et pourquoi la notion d'équilibre est si importante.
Le droit d'auteur peut être défini comme le droit exclusif qu'a une personne d'autoriser certains actes (tels que la reproduction, la publication, la représentation publique, l'adaptation, etc.) sur l'oeuvre dont elle est l'auteur. Le créateur de l'oeuvre est généralement titulaire du droit d'auteur, au moins au départ. Mais ce droit d'auteur est souvent vendu ou attribué ensuite, totalement ou en partie, à un éditeur commercial, un producteur de film, à un studio d'enregistrement ou à tout autre tiers qui exploitera l'oeuvre commercialement. C'est pourquoi le droit d'auteur répond bien souvent davantage à des intérêts commerciaux qu'à ceux d'auteurs individuels.
Dans le droit d'auteur l'accent a été mis, pendant longtemps, sur le fait que la protection assurée n'était pas instituée uniquement au seul profit de l'auteur mais pour répondre aussi à un intérêt public. Ainsi, dans la Constitution des Etats-Unis, l'un des exemples le plus patent, il est affirmé que l'objectif du droit d'auteur est, dans ce pays, de « promouvoir le progrès de la science et des lettres de manière utile en assurant aux auteurs et aux inventeurs, pendant une période limitée, un droit exclusif sur leurs écrits et leurs découvertes respectives ». De la même manière, le Statut d'Anne de 1710, première loi sur le droit d'auteur dans le monde, qui a été adopté au Royaume-Uni, déclarait que l'objectif poursuivi était d'encourager l'apprentissage du savoir.
On a répondu à l'intérêt public en incitant les auteurs à créer et en encourageant parallèlement la diffusion de nouvelles connaissances. Les créateurs jouissent ainsi du droit de contrôler leurs oeuvres et sont rémunérés pour toute diffusion ultérieure de celles-ci. Sans ces incitations, certains auteurs n'auraient aucune motivation pour prendre du temps et faire des efforts afin de produire une création originale de qualité. On notera néanmoins également qu'un nombre non négligeable de créateurs (surtout dans le monde universitaire) accorde une valeur bien plus grande à la diffusion de leurs créations plutôt qu'au versement d'une rémunération directe liée à l'usage de leurs oeuvres.
En outre, les nouvelles idées et les nouvelles connaissances bénéficieront difficilement à la société si leur transmission est limitée. Ce n'est que lorsqu'une information est apprise, discutée et reprise par des étudiants, des chercheurs, des scientifiques et de simples citoyens que sa valeur peut être réellement appréciée.
Les moyens de favoriser l'intérêt public sont souvent sous tension puisque l'on permet aux titulaires de droits de contrôler la diffusion de leurs oeuvres alors que parallèlement l'on encourage une diffusion rapide et à une large échelle de l'information contenue dans ces mêmes oeuvres. C'est seulement par un équilibre adéquat, résultat d'une réflexion, entre ces deux objectifs concurrents que le régime de droit d'auteur va maximiser à la fois la création et la communication de nouvelles connaissances et de nouvelles idées.
On perçoit le besoin d'équilibre dans la Déclaration universelle des droits de l'homme qui reconnaît que les deux parties de l'équation sont fondamentales pour l'humanité. La protection du travail des auteurs est garantie par l'article 27(2) qui affirme que « Chacun a droit à la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production scientifique, littéraire ou artistique dont il est l'auteur». Quant au droit de tous à partager les produits culturels et scientifiques de l'humanité, il fait l'objet d'un autre article, l'article 27(1) qui garantit que « Toute personne a le droit de prendre part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent ».
L'IFLA soutient fortement l'idée que le droit d'auteur doit être équilibré. Dans sa prise de position sur le droit d'auteur dans l'environnement numérique (annexe 1), l'IFLA déclare que:
« Les bibliothécaires et les professionnels de l'information reconnaissent que leurs clients ont besoin d'accéder à des oeuvres protégées par le droit d'auteur, aux informations et aux idées qu'elles contiennent et s'engagent à les soutenir. Ils respectent aussi les besoins des auteurs et des ayants-droit qui attendent un retour économique équitable de leur propriété intellectuelle. Un accès effectif aux oeuvres est essentiel pour atteindre les objectifs du droit d'auteur. L'IFLA soutient une loi sur le droit d'auteur équilibrée qui favorise la société dans son ensemble et accorde une protection forte et efficace aux intérêts des ayants droits ainsi qu'un accès acceptable (aux oeuvres) afin d'encourager la créativité, l'innovation, la recherche, l'éducation et le savoir. »
Les partisans d'un droit de la propriété intellectuelle fort sont particulièrement nombreux aujourd'hui. Les entreprises de communication et leurs associations commerciales voudraient obtenir des droits accrus pour les titulaires de droit puisqu'il sont reconnus comme étant le meilleur moyen de maximiser leur revenu potentiel. Mais il est bien plus difficile de trouver des partisans ayant le même poids sur l'autre versant de la balance du droit d'auteur, à savoir ceux qui soutiennent les besoins du public de disposer d'un accès légitime acceptable aux documents protégés par le droit d'auteur. Cette situation s'explique en partie parce que ceux qui préconisent des droits plus forts pour les titulaires de droit y ont un intérêt financier. Le soutien aux intérêts du public, qui doit pouvoir accéder de manière plus large à ces documents, est plus diffus, ne répond pas généralement à un motif économique direct et incite, de ce fait, beaucoup moins le soutien de professionnels. Le secteur des bibliothèques, cependant, s'enorgueillit de se percevoir comme étant le gardien de l'intérêt public à cet égard.
Les bibliothèques sont les principaux acquéreurs d'oeuvres protégées par le droit d'auteur sur support analogique et numérique et rendent ces documents disponibles à leurs clients afin qu'ils puissent les feuilleter, les lire et les utiliser. Les bibliothécaires et les professionnels de l'information font de leur mieux en utilisant toutes leurs compétences pour protéger les oeuvres de leurs fonds contre les usages illicites en regard du droit d'auteur.
L'accès à la connaissance est vital pour de nombreuses raisons :
Un équilibre entre les intérêts des ayants droit à recevoir une rémunération équitable pour leurs efforts et les intérêts des usagers de ces oeuvres à avoir un accès acceptable aux documents protégés a été maintenu dans le passé par différents moyens. L'un des plus important est la mise en oeuvre d'une série de limitations et d'exceptions aux droits exclusifs des titulaires des droits, point qui est le thème même de ce document. Mais, en dehors des exceptions, il existe d'autres limitations importantes au contrôle des connaissances qui est autorisé par le droit d'auteur dont certaines ont moins de poids dans l'environnement électronique.
Ces autres limitations au droit d'auteur sont les suivantes :
Le droit d'auteur a une durée limitée après laquelle les oeuvres protégées entrent dans le domaine public et peuvent être librement utilisées par n'importe qui et à n'importe quelle fin. C'est un aspect très important du droit d'auteur car il garantit la possibilité de disposer, de manière permanente, d'un énorme fonds de documents ressources pour l'éducation, la recherche et le développement de nouvelles oeuvres.
Pourtant, l'entrée des oeuvres protégées dans le domaine public a été repoussée par les augmentations successives de la durée des droits d'auteur. La durée maximale, lorsque la première loi sur le droit d'auteur avait été promulguée en Angleterre, après l'adoption du Statut d'Anne, était de vingt-huit ans. Depuis, la durée du droit d'auteur a augmenté dans de nombreux pays pour être fixée à soixante-dix ans après la mort de l'auteur, ce qui la situe très au-delà de tout [cadre ]d'exploitation commerciale jugée raisonnable. Aux Etats-Unis, Lawrence Lessig soutient que la durée du droit d'auteur a été augmentée au moins de onze fois au cours des quarante dernières années. Le Professeur Peter Jaszi a parle à cet égard d'un « droit d'auteur perpétuel lié à une vente à tempérament ».
Alors que la durée du droit d'auteur donne à l'auteur une période déterminée de protection, l'extension progressive de la durée porte injustement préjudice aux usagers de l'information. L'explication donnée pour justifier l'extension de la durée de protection est que l'espérance de vie s'accroît et que la période de protection doit être adaptée à cette extension. Mais cet argument ne peut pas retenu car la durée du droit d'auteur perdure aujourd'hui après la mort de l'auteur. En outre, des durées croissantes de protection portent davantage préjudice à certains pays en voie de développement où l'espérance de vie d'un adulte est faible. En fait, l'extension de la durée des droits bénéficie essentiellement aux ayants droits et à leurs descendants dans les pays développés et se fait aux dépens des usagers de l'information et des nouveaux créateurs potentiels à la fois dans les pays développés et les pays en voie de développement. Ce résultat infléchit l'équilibre qui avait été instauré et empêche une réutilisation créative des oeuvres anciennes.
L'IFLA estime aussi qu'il est paradoxal que l'extension de la durée des droits d'auteur soit souhaitée alors que de nombreux gouvernements encouragent parallèlement un accès croissant aux contenus locaux grâce à la numérisation. Une grande partie de ce contenu est perçu par les titulaires de droits comme n'ayant aucune valeur économique. Pourtant, il celui-ci continue à rester largement inaccessible car il ne peut pas entrer dans le domaine public avant l'expiration de la durée prévue - bien au-delà de la vie de l'auteur. Ainsi, aux États-Unis, après l'adoption de la loi sur l'extension du droit d'auteur (Copyright Term Extension Act), on a noté que quasiment aucune oeuvre supplémentaire ne pourra entrer dans le domaine public avant l'an 2023. Avec des droits d'auteurs qui bénéficient d'une telle durée, la mise en oeuvre d'exceptions s'avère d'autant plus importante.
La capacité d'un titulaire des droits à contrôler l'usage de son oeuvre est limitée à une suite de droits qui sont accordés de manière spécifique par un régime de droit d'auteur. Ces droits incluent habituellement le droit de reproduire, le droit de communiquer au public, le droit d'éditer, etc. Tous les autres usages, qui n'entrent pas dans ce cadre, ne peuvent pas faire l'objet du contrôle du titulaire des droits. Ainsi, par exemple, si la permission du titulaire des droits est requise pour imprimer des copies d'un ouvrage, lorsqu'une reproduction est faite en toute légitimité et est vendue, le titulaire des droits ne peut pas contrôler les utilisations de cette copie (à l'exception de l'importation dans certains pays et des droits de location et de prêt en Europe). L'acheteur, en effet, est libre de lire un livre autant de fois qu'il le souhaite, de le prêter, de l'emprunter, de le vendre ou de le détruire. (C'est un point qui découle de la doctrine américaine de la « première vente »).
On notera que l'environnement numérique va, à nouveau, affaiblir de manière importante le poids de cette limitation puisque de nombreux usages d'une oeuvre numérique représentent soit une reproduction, soit une communication, soit l'ensemble des deux actes. Or, l'accès à des oeuvres protégées dans l'environnement numérique implique une reproduction, ne serait-ce que de manière temporaire, par exemple lorsqu'il s'agit d'une copie cache. Si le droit de contrôler une reproduction n'est pas limité, un ayant droit disposera d'un droit de contrôle total sur chaque accès.
Au départ, le droit d'auteur ne s'appliquait qu'aux ouvrages. Il a été étendu depuis pour inclure un ensemble de plus en plus large de documents, qu'il s'agisse de véritables créations ou non. Ainsi, par exemple, certaines compilations de données uniquement factuelles (comme des organigrammes) peuvent être protégées par le droit d'auteur si elles répondent au test d'originalité ou bien, tout simplement par une protection au titre du droit des bases de données dans de nombreux pays, bien que ce ne soit pas toujours le cas, notamment aux Etats-Unis. Dans les pays où de telles données sont protégées, la distinction classique faite entre une idée et son expression dans le droit d'auteur n'existe plus, ce qui signifie que les usagers sont limités dans leur possibilité d'extraire des données factuelles contenues dans une base de données, comme des listes d'adresses ou des oeuvres plus proches de réelles créations.
En raison de l'impact de ces limitations fondées sur le droit d'auteur dans l'environnement numérique, d'autres exceptions et limitations ont pris de l'importance. Il convient de ne pas oublier que le droit d'auteur est un monopole. Sans les exceptions, les titulaires de droits auraient ainsi un monopole total sur le savoir, soit un contrôle de l'accès à toutes les connaissances dans l'ère numérique.
Les exceptions aux droits des titulaires de droit sont apparues presque au même moment que les droits d'auteur. Le Statut d'Anne anglais (en 1710) ne prévoyait aucune exception mais exigeait que les copies soient déposées auprès des sept bibliothèques les plus importantes du pays pour être protégées - ce qui représente la première codification d'un principe d'équilibre qui consistait à établir qu'en échange d'une protection au titre du droit d'auteur des copies d'une oeuvre devaient être rendues disponibles au public.
L'article 9(2) de la Convention de Berne (Convention de Paris de 1971) autorise les pays membres à créer des exceptions dans le respect des droits de reproduction des titulaires de droits, à condition que ces exceptions :
La Convention de Berne contient aussi l'article 10 (qui autorise une libre utilisation des oeuvres à des fins de citations et d'illustration pour l'enseignement) et l'article 10 bis (qui permet d'autres usages libres pour présenter des événements d'actualité). Les articles 11 bis et 13 autorisent la mise en oeuvre de licences obligatoires dans certaines autres circonstances.
On trouvera des clauses similaires dans l'accord de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les aspects relatifs aux droits de la propriété intellectuelle liés au commerce (ADPIC) (en particulier dans l'article 9(2) de Berne repris dans l'article 13 de l'accord sur les ADPIC au regard de tous les droits et non du seul droit de reproduction).
Les exceptions représentent une partie importante de nombreux régimes nationaux de la propriété intellectuelle. L'exception la plus connue est sans doute la doctrine du « Fair Use »(usage loyal) aux Etats-Unis. Cette clause a été promulguée dans la section 107 du décret de 1976 du Titre 17 de la loi américaine sur le copyright mais elle trouve son origine dans un procès qui a eu lieu il y a plus d'un siècle. Lors de celui-ci, on y avait affirmé que le « Fair Use » ne représentait pas une violation du droit d'auteur. La loyauté est déterminée en fonction de quatre principes :
Des utilisations telles que la « critique, le commentaire, les reportages d'actualité, l'enseignement (notamment les copies collectives pour l'usage d'une classe), l'étude et la recherche ont été proposées pour faire partie des usages loyaux potentiels mais cette liste n'est pas fermée. D'autres utilisations peuvent également entrer dans les critères du « Fair Use ». Ceci permet ainsi à un très large ensemble d'usages libres potentiels et évolutifs d'être couverts par ces exceptions.
D'autres pays tels que le Royaume-Uni, le Canada, l'Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande ainsi que d'autres pays du Commonwealth disposent de clauses voisines liées à des fins précises (comme le « Fair Dealing pour la recherche et l'étude à des fins personnelles »). Ces pays disposent généralement d'un large ensemble d'exceptions définies de manière relativement précise pour le bénéfice des individus, des établissements d'enseignement, des bibliothèques et d'autres institutions culturelles et de l'administration. (Les États-Unis disposent aussi d'une autre clause, la section 108, au profit des bibliothèques et des archives). Toutes ces exceptions ont été reconnues comme pouvant être acceptées.
"L'exception de Fair Dealing qui permet d'échapper à la violation du droit d'auteur est et a toujours été, clairement fondée sur la reconnaissance du caractère primordial de l'intérêt du public qui doit pouvoir copier ou reproduire des oeuvres protégées à certaines fins comme la recherche et l'étude, la critique ou l'analyse, l'actualité, les opérations judiciaires et pour des conseils juridiques ».
Les pays qui ne sont pas des pays de « Common Law » ne disposent généralement pas d'un aussi large éventail d'exceptions. Néanmoins, plusieurs d'entre eux autorisent un nombre important d'usages libres.
Selon Goldstein :
« Il n'existe pas de clause spécifique pour des pratiques loyales - de Fair Dealing - dans les pays de droit civil, mais la loi sur le droit d'auteur, dans la plupart de ces pays, comporte des exceptions comparables à celles qui sont accordées au nom de pratiques jugées acceptables. Ainsi, la loi française accorde quelques exceptions applicables aux oeuvres publiées. Elles permettent de faire des copies privées et, tant que la source et le nom de l'auteur sont clairement mentionnés, des revues de presse et des analyses ainsi que de courtes citations à des fins critiques, éducatives, polémiques ou scientifiques. La loi allemande sur le droit d'auteur autorise une longue liste d'exceptions limitées, outre la citation et l'usage privé."
Les traités de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), adoptés à Genève en décembre 1996, ont dressé un cadre international pour des régimes de droit d'auteur dans l'environnement numérique dans le monde. Le traité sur le droit d'auteur et le traité sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes de l'OMPI, deux traités qui viennent récemment d'enter en vigueur après la trentième ratification de chacun d'entre eux, représentent une révision importante de la Convention de Berne qui régit le régime international du droit d'auteur.
Le traité sur le droit d'auteur fournit expressément aux Etats membres les moyens de promulguer des exceptions au sein des limites définies par le test des trois étapes :
« Article 10 : Limitations et exceptions
1) Les Parties contractantes peuvent prévoir, dans leur législation, d'assortir de limitations ou d'exceptions les droits conférés aux auteurs d'oeuvres littéraires et artistiques en vertu du présent traité dans certains cas spéciaux où il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur.
2) En appliquant la Convention de Berne, les Parties contractantes doivent restreindre toutes limitations ou exceptions dont elles assortissent les droits prévus dans ladite convention à certains cas spéciaux où il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur. »
En outre, la déclaration commune concernant l'article 10 donne des éclaircissements sur ces dispositions en autorisant les pays signataires à étendre les exceptions dans l'environnement numérique :
À propos de l'article 10, il est entendu que les dispositions de l'article 10 permettent aux Parties contractantes de maintenir et d'étendre de manière adéquate dans l'environnement numérique les limitations et exceptions prévues dans leurs législations nationales qui ont été considérées comme acceptables en vertu de la Convention de Berne. De même, ces dispositions doivent être interprétées comme permettant aux Parties contractantes de concevoir de nouvelles exceptions et limitations qui soient appropriées dans l'environnement des réseaux numériques.
Il est aussi entendu que l'article 10.2 ne réduit ni n'étend le champ d'application des limitations et exceptions permises par la Convention de Berne ».
Plusieurs pays développés ont revu ou entrepris de revoir leurs lois sur le droit d'auteur pour les mettre en conformité avec les traités de l'OMPI. Les Etats-Unis, l'Australie et l'Union européenne ont ainsi promulgué des lois importantes transposant le traité sur le droit d'auteur. Au tout début de l'année 2003, tous les pays de l'Union européenne devraient avoir transposé la nouvelle directive sur le droit d'auteur. D'autres pays comme le Canada, la Nouvelle-Zélande et l'Afrique du Sud sont en train de revoir leur législation sur le droit d'auteur. La manière dont ces traités sont transposés déterminera, dans une large mesure, l'avenir de l'équilibre instauré par le système de droit d'auteur qui a été si important pour les usagers de l'information dans le passé.
La plus connue et la plus controversée des transpositions des traités de l'OMPI est le Digital Millennium Copyright Act (DMCA) des États-Unis. Non seulement, elle en a modifié la loi américaine sur le droit d'auteur en ajoutant une protection juridique aux mesures de protection techniques des oeuvres protégées (point qui sera repris ensuite), mais elle a également amendé les exceptions au droit d'auteur dans l'environnement numérique.
La section 1201 du DMCA contient une clause de « sauvegarde » qui stipule qu'aucune nouvelle protection pour les titulaires de droits d'auteur (telle que la protection des mesures techniques mises en place par les titulaires de droit) ne doit affecter les exceptions ou limitations existantes, notamment celles qui sont autorisées au titre du Fair Use. La section 404 du DMCA modifie aussi l'exception existante pour les bibliothèques et les archives à des fins non lucratives dans la section 108 de la loi sur le droit d'auteur afin de concilier les technologies numériques et les pratiques en matière de conservation qui sont appelées à évoluer.
Plusieurs exceptions spécifiques aux protections des mesures de protections techniques ont également été instaurées, notamment :
Néanmoins toutes les institutions universitaires et tous les établissements d'enseignement ne sont pas satisfaits de toutes les dispositions du DMCA et le débat se poursuit sur un certain nombre de points.
L'adoption de la directive européenne sur le droit d'auteur (la directive sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information) a aussi été très controversée. La directive contient plusieurs exceptions facultatives, consacrées par l'usage, que chaque pays peut inclure dans la loi de transposition de cette directive, s'il le souhaite. Ceci concerne (moyennant un paiement ou non) les exceptions liées aux reproductions temporaires, la reprographie d'oeuvres protégées, l'usage privé, les copies faites par des institutions culturelles ou éducatives, les enregistrements éphémères d'oeuvres effectuées par des organismes de radiodiffusion pour leurs propres besoins, la reproduction d'émissions faites par des institutions sociales, l'illustration à des fins d'enseignement ou de recherche scientifique, l'utilisation au bénéfice de personnes handicapées, pour la communication d'articles publiés sur des thèmes d'actualité, lorsqu'il s'agit de citations faites à des fins critiques ou de revue, pour des utilisations à des fins de sécurité publique, l'utilisation de discours publics, l'utilisation lors de célébrations religieuses, l'utilisation d'oeuvres telles que des réalisations architecturales réalisées pour être placées en permanence dans des lieux publics, l'inclusion fortuite d'une oeuvre dans un autre produit et quelques autres utilisations, souvent de moindre importance.
La directive européenne sur le droit d'auteur est un exemple de la tendance très nette adoptée par certains titulaires de droits qui consiste à tenter d'éroder les exceptions traditionnellement reconnues. Les bibliothécaires ont dû faire un travail important de lobbying pour empêcher une limitation trop grande des autorisations accordées pour des pratiques loyales, en particulier pour les copies faites par les bibliothèques. Pour compenser la perte financière potentielle des titulaires de droits en raison de certaines exceptions, les Etats membres sont autorisés à instaurer une redevance, même si les exceptions optionnelles sont totalement conformes au test des trois étapes de la Convention de Berne. Les bibliothécaires affirment que lorsqu'une exception est autorisée, ceci implique qu'il a été reconnu que celle-ci n'impliquait aucun préjudice pour les titulaires de droits et que de ce fait il n'y avait aucune obligation de prévoir une compensation pour une perte de gain.
D'autres pays, comme l'Australie, ont aussi modifié leur régime de droit d'auteur pour le rendre compatible avec les nouvelles techniques numériques et ont inclus de nombreuses extensions aux exceptions dans l'environnement numérique. La loi qui a modifié la loi sur le droit d'auteur (Digital Agenda Act) en 2000 fournit un large éventail d'exceptions au droit d'auteur dans l'environnement numérique, notamment à des fins d'enseignement et d'étude, de critique et d'analyse, d'actualité, de communication par les bibliothèques et les archives des documents de leur fonds, de conservation par les bibliothèques de documents de leurs fonds, de reproductions temporaires et de copies à des fins éducatives. Cette loi inclut aussi une série d'opérations autorisées par une « personne qualifiée » qui peut légalement produire, importer ou fournir des outils de contournement des mesures de protection à des fins autorisées comme la reproduction et la communication par les services de bibliothèque et d'archives, l'ingénierie inverse de logiciels, les copies à des fins éducatives, les reproductions faites par le Parlement et le Gouvernement.
Utiliser la législation sur le droit d'auteur pour restreindre l'usage a des implications sérieuses pour l'éducation, en particulier dans les pays en voie de développement où les photocopies ou les copies numériques sont souvent les seules sources d'information disponibles. Pour donner un exemple, au cours des dernières années, le gouvernement sud-africain avait publié des amendements proposés à la loi sur le droit d'auteur et à ses décrets d'application qui auraient érodé le « Fair Use » et pratiquement supprimé toutes les exceptions à des fins d'éducation de la loi précédemment en vigueur. Le gouvernement sud-africain n'avait pas non plus répondu aux besoins des personnes handicapées, aux besoins liés à l'information à distance et à ceux des illettrés ainsi qu'à la question de la technologie numérique. Le secteur éducatif s'y était opposé fortement et avait réussi à faire retirer les amendements proposés.
En dépit des tentatives faites par plusieurs pays pour maintenir un équilibre, il est de plus en plus évident, pour l'IFLA, que l'équilibre traditionnel du droit d'auteur est, pour diverses raisons, sérieusement menacé dans l'environnement numérique. L'expansion récente de l'usage des mesures techniques de protection (et des lois qui les protègent) et l'environnement émergent des licences s'unissent pour infléchir l'usage des oeuvres protégées par le droit d'auteur pour créer un modèle de paiement à l'usage qui n'autorise un accès aux oeuvres qu'à ceux qui peuvent payer.
Recours aux mesures de protection technique
Le DMCA, adopté en 1998 aux États-Unis, a représenté la première tentative faite au niveau mondial pour mettre en oeuvre les traités de l'OMPI. Pour cette raison, mais aussi en raison de la taille ce pays et de son développement technologique, il représente un excellent baromètre des tendances liées au droit d'auteur numérique. Les mesures de protections techniques du droit d'auteur sont un thème crucial pour le monde des bibliothèques et les communautés éducatives car celles-ci permettent de contourner et d'éliminer effectivement toutes les exceptions au droit d'auteur. De telles mesures techniques ne font pas, en effet, la distinction entre les usages qui ne sont pas autorisés par les titulaires de droit mais sont permises par la loi et les usages qui ne sont pas autorisés par les titulaires de droits et qui enfreignent la loi. On notera que le même mécanisme de contrôle des copies qui empêche une personne de faire des copies interdites d'une oeuvre peut aussi empêcher un étudiant ou une personne handicapée visuelle de faire, en toute légitimité, des copies au titre du « Fair Use » ou du « Fair Dealing ».
Plusieurs procès récents aux États-Unis ont testé cette nouvelle approche de la manière suivante :
Ces interprétations du DMCA par les tribunaux indiquent que lorsqu'il y a un conflit entre les nouvelles mesures de protection techniques appliquées aux oeuvres protégées par le droit d'auteur et les nouveaux usages permis par les nouvelles technologies, ce sont les nouveaux usages qui en font les frais, à tel point que même ceux qui créent des outils qui auraient un double usage (pour des usages autorisés et non autorisés) peuvent eux-mêmes faire l'objet de poursuites pénales.
Parmi les exemples des inconvénients, voire des dangers, les mesures de protection technique contournant les exceptions dans l'article 6.4 de la directive européenne sur le droit d'auteur. Il autorise les gouvernements des Etats membres de l'Union européenne à intervenir, en l'absence d'accords volontaires entre les usagers et les titulaires de droits, pour permettre au bénéficiaire d'une exception d'en bénéficier. Mais il est nié dans les faits puisque la directive n'autorise aucune intervention lorsqu'il y a un contrat. Comme il est fort probable qu'il y aura un nombre prodigieux de contrats en ligne sur l'Internet dont la plupart des termes et des conditions seront imposées et non négociées, l'apport de l'intervention d'un Etat pour permettre l'usage des exceptions sera, dans les faits, limité à l'environnement hors ligne. De toute manière, une telle intervention prendra beaucoup de temps, demandera beaucoup d'efforts et sera probablement peu utilisée par les consommateurs.
Avec les lois sur la propriété intellectuelle et à l'usage croissant des technologies de gestion électronique des droits, les licences contractuelles contribuent aussi à remodeler l'environnement numérique lorsqu'elles sont utilisées pour limiter les droits des usagers. « Contrairement au support papier, l'information numérique n'est pas achetée par des consommateurs ou des bibliothèques mais fait l'objet d'une licence entre la bibliothèque et les fournisseurs d'information. Une licence prend généralement la forme d'un contrat écrit ou un accord entre la bibliothèque et le titulaire des droits pour pouvoir diffuser une information numérique ».
Les contrats de licences pour les bibliothèques prennent l'une des trois formes suivantes : la forme standard des licences tels que ceux utilisés pour le support papier, les licences résultant de l'arrachage de l'enveloppe plastique entourant le produit et des licences par clic. Dans la plupart des cas, aucune opportunité n'y est offerte pour négocier réellement les termes de ces licences et même lorsqu'il y a négociation, les pouvoirs respectifs des acheteurs et des producteurs sont inégaux de manière caricaturale. Les licences « shrink-wrap » sont baptisées ainsi car elles sont insérées dans une enveloppe plastique qui entourent un support matériel renfermant la propriété intellectuelle (comme un cédérom). Des licences par clic sont régulièrement utilisées pour des oeuvres protégées acquises en ligne où, avant que les usagers puissent accéder à une partie donnée de l'oeuvre, il leur est demandé de signaler d'abord s'ils acceptent l'accord de licence proposé (généralement en cliquant sur le module « j'accepte »). Si les accords-types peuvent éventuellement être négociés, les licences par arrachage de l'emballage ou par clic ne le sont jamais.
De nombreuses raisons poussent un fournisseur à vouloir utiliser un accord de licence. L'IFLA n'est pas opposée à l'usage de tels accords à condition que les positions des deux parties soient équilibrées. Autrement dit lorsqu'une partie veut vendre quelque chose et que l'autre a un pouvoir d'achat permettant de l'acquérir, les deux parties doivent pouvoir négocier les termes et les conditions de l'usage. Mais ils posent un problème qui prend de plus en plus d'ampleur lorsque de tels accords sont utilisés comme une loi émanant d'une seule partie puisque les accords de licence contournent régulièrement les exceptions au droit d'auteur et imposent un niveau d'usage plus restrictif que celui qui est accordé par la loi. Les licences peuvent proposer un vaste éventail de termes et de conditions mais, contrairement à la loi sur le droit d'auteur, les fournisseurs ne sont pas statutairement obligés de tenir compte de l'intérêt public pour un accès à l'information dans les dispositions régissant les termes et les conditions d'usage. Puisque de nombreuses informations numériques sont diffusées par le biais de licences, des préoccupations de politique publique comme le « Fair Use », le « Fair Dealing »ou des exceptions au droit d'auteur sont sur le point de devenir nulles et sans objet. Il est de ce fait essentiel que les limitations et les exceptions soient soigneusement reprises en considération dans le domaine numérique afin de protéger l'accès à l'information.
Quelques exemples de restrictions souvent imposées par les contrats de licences. Des limitations :
La combinaison des mesures de protection techniques et des licences peut conduire vers une protection, sans aucune limite, des intérêts des titulaires de droits qui bénéficient de plusieurs couches de protection : le droit d'auteur, les mesures de protection techniques, la protection juridique des mesures techniques et la loi sur les contrats.
« La technologie numérique permet [aux éditeurs ] de connaître chaque accès à l'information électronique et de le faire payer, même s'il s'agit d'une simple visualisation rapide. Le poids qu'ils acquièrent ainsi leur permettent d'imposer des prix monopolistiques et des termes potentiellement excessifs sur les usages, y compris pour les bibliothèques, les universités, les centres et instituts de recherche et de ne pas tenir compte les conséquences sociales qui résultent de l'incapacité des organisations de recherche à payer pour de tels accès ».
La plupart des copies d'oeuvres imprimées dans les bibliothèques sont utilisées à des fins d'enseignement, de recherche, pour des études personnelles ou à des fins de conservation. Les raisons généralement invoquées pour justifier les copies sont les difficultés que peuvent avoir les usagers à lire les documents dans les locaux de la bibliothèque (les oeuvres sont consultées par un autre usager ou servent d'usuels) ou le souhait de l'usager de vouloir les lire à un autre moment, plus approprié pour lui. En dépit des inquiétudes du titulaire des droits sur la perte des ventes représentées par ces copies, aucune preuve ne peut être donnée quant au fait que la copie de parties jugées acceptables d'oeuvres protégées par le droit d'auteur puissent affecter les ventes. Ceux qui copient n'achèteront pas forcément une oeuvre s'ils ne peuvent plus la copier et il n'y a aucune raison de croire que ce raisonnement ne puisse pas non plus s'appliquer aux oeuvres numériques.
L'IFLA est convaincue, de ce fait, que non seulement les exceptions traditionnelles au droit d'auteur doivent être préservées à la fois dans l'environnement traditionnel (analogique) mais aussi dans l'environnement numérique mais aussi que ce point doit être abordé parallèlement aux questions liées à l'usage croissant des technologies de protection du droit d'auteur et des accords de licences contractuelles. Il n'est pas utile que les lois nationales garantissent les droits au titre du Fair Use si ceux-ci sont immédiatement et presque toujours contournés par des licences par clic non négociées ou par des systèmes de protection techniques.
L'IFLA est aussi persuadée que si les exceptions autorisées par les lois nationales sont conformes au test des trois étapes de la Convention de Berne, les intérêts des titulaires de droits ne subiront aucun préjudice. C'est pourquoi, aucune demande d'autorisation supplémentaire ou demande d'indemnité compensatrice pour ces usages ne devraient être requises.
On devrait aussi garder en mémoire que les besoins des usagers dans les pays en voie de développement sont plus importants que dans les pays développés. De nombreuses exceptions sont nécessaires, en particulier pour lutter contre l'illettrisme, par exemple par des programmes d'alphabétisation, des modules d'enseignement primaire destinés aux adultes, etc.
La position de l'IFLA sur le droit d'auteur sur ces questions est la suivante :
L'IFLA maintient, qu'à moins que ne soient accordées aux bibliothèques et aux citoyens des exceptions qui permettent un accès et un usage raisonnable pour des utilisations qui ne causent aucun préjudice aux intérêts des titulaires de droit qui soient conformes aux pratiques loyales comme l'éducation et la recherche, le danger est grand de voir que seuls ceux qui ont les moyens d'acquérir une information puissent tirer un avantage des bénéfices de la société de l'information. S'il n'y a aucune exception répondant à l'intérêt public, notamment dans l'environnement numérique, on notera un accroissement progressif de fracture qui existe déjà entre les info-riches et les info-pauvres dans les pays développés ainsi que dans les pays en voie de développement. Ceci ne veut pas dire qu'il faut forcer les titulaires de droits de diffuser leurs oeuvres librement. Une fois que l'oeuvre a été acquise légalement, c'est-à-dire achetée par une bibliothèque ou un individu, quelques exceptions devraient être autorisées par les lois nationales, qui soient conformes au test des trois étapes de la Convention de Berne. En outre, il ne devrait y avoir aucune discrimination entre les lois sur le droit d'auteur concernant les personnes handicapées visuelles, celles qui ont des difficultés d'audition ou des difficultés d'apprentissage. Adapter ces documents à d'autres formats pour les rendre disponibles (à ces personnes) ne devrait pas être considéré comme une violation du droit d'auteur mais comme un accès acceptable. En outre, dans des pays qui ont plusieurs langues et dialectes, le besoin est très grand de disposer d'exceptions autorisant des traductions et des reproductions de documents à des fins d'alphabétisation et d'enseignement.
Dans les lois nationales sur le droit d'auteur, les exceptions au droit d'auteur et aux droits voisins autorisées par la Convention de Berne et reprises par les traités de l'OMPI, devraient être revues, si nécessaire, afin d'assurer que les usages autorisés s'appliquent de la même manière à l'information sur des supports électroniques et sur support papier. Pour pouvoir effectuer des copies dans des cadres qui n'entrerait pas dans le cadre de ces dispositions, on devrait également prévoir de paiements administratifs simples ou divers schémas de licences.
L'IFLA soutient une modification en faveur de tarifs différents et moins coûteux pour des communautés défavorisées. Les pays en voie de développement n'ont pas toujours, en effet, les ressources leur permettant de payer des droits d'auteur élevés, en particulier, en devises étrangères. S'ils ne peuvent pas s'offrir les droits de licences, l'accès aux documents pour le bénéfice de leurs communautés leur est interdit. Des documents moins pertinents ou périmés leur seront alors substitués, ce qui a des implications graves, en particulier lorsque des informations récentes sont essentielles, comme l'information sur les soins médicaux, sur le SIDA, etc.
Des copies temporaires ou copies techniques qui sont accessoires à l'usage de documents protégés par le droit d'auteur et qui n'ont aucune valeur économique devraient être exclues du cadre du droit de reproduction.
Pour des oeuvres sur des supports numériques, qui n'impliquent aucun paiement ou demande d'autorisation supplémentaire, tous les usagers légitimes d'une bibliothèque devraient pouvoir :
L'IFLA est persuadée que le partage des ressources joue un rôle vital pour l'éducation, la démocratie, la croissance économique, la santé, le bien-être et le développement personnel. Il facilite l'accès à un éventail toujours plus large d'informations qui n'aurait pas pu être disponibles par d'autres voies à l'usager, à la bibliothèque ou au pays qui en aurait fait la demande. Le partage des ressources n'est pas un mécanisme qui réduit les coûts mais qui augmente leur disponibilité à ceux qui, pour des raisons économiques, techniques ou sociales ne peuvent pas avoir un accès direct à cette information. Lorsqu'une bibliothèque dispose d'un accès légal à une oeuvre numérique et qu'elle fournit ensuite un accès à des fins légitimes telles que la recherche ou l'étude, ceci devrait être permis par la législation sur le droit d'auteur.
Le prêt public non commercial n'est pas une activité qui a été traditionnellement contrôlée par la loi sur le droit d'auteur. Mais dans quelques pays cet acte est désormais contrôlé. Le prêt public est essentiel pour la culture et l'éducation. Il devrait être proposé à tous. L'information sur tous supports a été et devra faire partie intégrante du fonds destiné à être prêté. Le prêt, à son tour, contribue à faire la promotion des informations proposées commercialement et encourage les ventes. Les bibliothèques sont, en effet, des catalyseurs pour la vente de l'information sur tout type de supports. C'est pourquoi, toute restriction légale ou contractuelle appliquée au prêt serait faite au désavantage des ayants droit ainsi qu'à celui des bibliothèques. Malheureusement un précédent a été instauré lorsque l'Union européenne a fait du prêt un acte limité par le droit d'auteur bien que cela ne représentât pas une obligation internationale.
L'IFLA est convaincue que le prêt de documents par des bibliothèques ne droit pas être restreint par la loi et que les dispositions contractuelles, par exemple, dans le cadre d'accords de licences ne devraient pas contourner la possibilité de faire un prêt raisonnable de ressources électroniques par le personnel des bibliothèques et des centres d'information.
Les bibliothèques collectent et préservent l'information. La responsabilité de la préservation de l'information et de la culture fait d'ailleurs largement partie du métier de bibliothécaire et d'autres professionnels de l'information.
Les lois sur le droit d'auteur devraient autoriser les bibliothèques à copier des oeuvres protégées par le droit d'auteur afin de procéder à leur conservation. La loi ne devrait pas interdire aux bibliothèques d'avoir recours aux nouvelles techniques pour améliorer les techniques de conservation et rendre les documents conservés sous forme numérique disponibles aux usagers des bibliothèques.
La loi devrait accorder aux bibliothèques et aux services d'archives l'autorisation, lorsque cela s'avère nécessaire de transformer des oeuvres protégées sur le droit d'auteur en oeuvres numériques à des fins liées à la préservation et à la conservation et les bibliothèques devraient être autorisées à donner un accès à de tels documents comme s'il s'agissait d'un livre, y compris par un accès en ligne et hors ligne.
Bien que les bibliothèques en tant qu'intermédiaires aient un rôle important à jouer en assurant la formation et le respect des lois sur le droit d'auteur, la responsabilité ultime devait être peser sur l'auteur même de l'infraction. La législation sur le droit d'auteur devrait donner des limitations claires sur la responsabilité des parties tierces lorsque la conformité aux règles établies ne peut pas être pratiquement ou raisonnablement surveillée.
Les termes des accords de licences contractuelles relatives à des oeuvres protégées par le droit d'auteur devraient comporter des clauses intégrant les politiques publiques dans des domaines comme le droit d'auteur, le respect de la vie privée, la liberté d'expression et les droits des consommateurs. Les accords de licence pour un accès à l'information ne devraient pas exclure les usagers de l'information ou avoir un impact négatif sur ceux-ci en supprimant des droits qui pourraient leur être accordés par la loi sur le droit d'auteur. L'IFLA affirme que les accords de licences doivent compléter la loi sur le droit d'auteur non s'y substituer.
Les lois nationales sur le droit d'auteur devraient rendre nuls tous les termes d'un contrat qui restreint ou contourne les exceptions ou limitations contenues dans les lois sur le droit d'auteur lorsque la licence est établie unilatéralement par le titulaire des droits sans donner aucune possibilité de négociation des termes de la licence par l'usager. La licence devrait au moins permettre à un usager de lire, télécharger et imprimer des oeuvres pour son propre usage, sans aucune restriction.
La protection au titre du droit d'auteur devrait encourager et non interdire l'utilisation des oeuvres. La loi sur le droit d'auteur ne devrait pas donner aux titulaires de droits le pouvoir supplémentaire d'utiliser des mesures techniques pour contourner les exceptions et les limitations au droit d'auteur et infléchir l'équilibre instauré par les lois sur la propriété intellectuelle au niveau international et national. C'est l'accès à l'information et non le contrôle de l'information qui accroît l'utilisation de celle-ci. Des études ont naturellement démontré que trop de contrôle, sous la forme de protection technique, est contre-productif. Le contournement des mesures de protection pour des activités qui ne violent aucun droit devraient être autorisées.
En conclusion, il sera réaffirmé que les lois nationales sur le droit d'auteur devraient viser à assurer un équilibre entre les droits des titulaires de droits à protéger leurs intérêts par des moyens techniques et les droits des usagers à contourner de telles mesures pour des usages légitimes et autorisés par la loi.
L'IFLA se félicite d'avoir eu l'opportunité de faire ces commentaires sur les besoins de disposer d'exceptions adaptées pour soutenir les objectifs de l'UNESCO en matière d'éducation, de lutte contre l'illettrisme et en faveur d'une justice sociale. Elle encourage l'UNESCO à consulter aussi largement que possible sur cette question très importante. L'IFLA croit sincèrement que le lobbying de certains titulaires de droits contre les exceptions au droit d'auteur existant au niveau national, auquel s'ajoute l'usage croissant des mesures de protection technique appliquées aux oeuvres et les conditions restrictives des conditions des licences, nous mènent vers une situation où la diffusion de la culture et de la connaissance est menacée et où le niveau de diffusion n'est plus conforme aux objectifs, plus larges, de politique publique. L'IFLA ne croit pas que la meilleure solution pour faire face aux problèmes de droit d'auteur dans l'environnement numérique est de replacer un ensemble de règles sur la loi sur le droit d'auteur définissant unilatéralement des conditions d'accès établies par les fournisseurs d'informations.
L'objectif premier du droit d'auteur était de protéger les auteurs ou les créateurs dans le cadre plus large de l'intérêt public. Nous vivons aujourd'hui dans un environnement numérique où le danger est grand de voir le droit d'auteur devenir un mécanisme de protection légal instauré au bénéfice de diverses multinationales. La menace est croissante pour le côté de la balance qui représente l'intérêt public du droit d'auteur alors que certains titulaires de droits exercent un pouvoir énorme pour instaurer leurs propres règles et construire une "loi privée " qui ne prend pas nécessairement en compte l'équilibre créé par les lois sur le droit d'auteur.
L'IFLA ne veut pas voir un environnement où un contrôle total sur l'accès à l'information est dans les mains d'un petit nombre d'entreprises multinationales. Si tous les usages de l'information sont contrôlés, seuls les plus riches pourront tirer bénéfice d'un accès aux productions créatives faites dans le monde. A moins que des limites à ce contrôle ne soit instaurées, l'IFLA craint que cette situation n'entrave la possibilité de tout avantage pour la société. Il n'est pas possible de faire confiance aux titulaires de droits afin qu'ils mettent en première position les intérêts de la société dans son ensemble. C'est le rôle d'un Etat. Bien que personne ne conteste les droits des titulaires de droit à obtenir un retour de leurs investissements, des limitations, sous la forme d'exceptions, doivent faire partie de l'équation qui permet à la société d'obtenir aussi un retour sur ses investissements en matière d'éducation et de recherche. Ce n'est qu'à ce titre qu'un équilibre sera obtenu.
Annexe 1: Déclaration de L'IFLA sur le droit d'auteur dans l'environnement numérique.
Traduction française :cfi.ifla.free.fr/accueilifla/droitauteurcorps.htm
Annexe 2 : L'IFLA approuve les principes fondamentaux pour les contrats de licence de ressources électroniques.
Traduction française : http://cfi.ifla.free.fr/accueilifla/licensecorps.htm
IFLA CLM septembre, 2002
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Dernière révision : 1er octobre 2002 |
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